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"René l'énervé" au théâtre du Rond Point"Opéra Bouffe et Tumultueux"
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"Réné l'énervé" : un grand spectacle musical qui rappelle des événements ayant existés...
Tout commence avec l’arrivée d’un chœur antique « venu spécialement de Grèce pour faire plus authentique… premier au palmarès des opéras tragiques ». Après s’être présenté à capella, la musique va venir rythmer ce prologue, interprété par Achille, Electre, Yannick et…. « Monique… née en Belgique » ! Autant dire que le texte de Jean-Michel Ribes, (qu’il soit chanté ou pas) d'une part rime toujours et d'autre part est d’une grande originalité tant il est inattendu. Il est, vous l'aurez compris, loin d’engendrer la mélancolie.
La musique signée Reinhardt Wagner utilise des styles particulièrement variés : du rap (interprété par le chœur antique), du classique avec de véritables envolées lyriques dignes d’un opéra. Tous les interprètes sont d’un excellent niveau vocal : la partition ne laisse pas de place aux chanteurs d’un niveau moyen. Les comédiens interprètent de nombreux rôles, excepté Thomas Morris (René) qui est pratiquement tout le temps sur scène (au début il est aussi parmi la foule pour « La ville en émois »).
L’histoire s’inspire des évènements d’avant et d’après les dernières élections, et maintient le spectateur en haleine. On peut s’amuser à chercher qui est qui. Par exemple, dans l’opposition se trouvent Gaufrette et Ginette, et l’ancien président est appelé « le vieux pacha ».
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Le chœur antique |
Monique et Gaufrette |
"le Réveil de l'oppostion" |
Le texte est souvent cinglant voire « politiquement incorrect » : « J’aime l’Arabe quand il est blond, quand il se nourrit de jambon… quand il n’est pas trop nombreux ».
A de nombreuses reprises, les phases sont savoureuses. Ainsi Bella Donna dira de René : « il ne m’arrive qu’à l’avant bras…. Je le dépasse de deux têtes, je sais qu’il ne grandira pas…. Je lui ferai des talonnettes ».
La rencontre entre Donna Bella et René |
Le premier conseil des ministres, avec notamment "le ministre pour-la-modestie-on-ne-connait-personne" |
Jean-Michel Ribes aurait pu écrire une simple caricature, ou une histoire narrant les faits politiques. Il a choisi de présenter à sa façon les évènements pré et post-électoraux avec les différents partis politiques.
Personne n’est épargné : en plus de l’opposition, on trouve « les Cons de la Nation », les « Bio bio bio bio, écolos » et même les « philosophes » (n’ayant pour seule obsession que de passer à la télé… quitte à disserter sur la confiture !)
Une des idées originales de l’histoire est d’avoir fait un double à « René », (René 2) celui qui a une conscience, et ne se reconnaît plus quand il se voit. René 2 ne voulait qu’avoir « une grande épicerie…pour vendre… deux ou trois produits fabriqués en Hongrie ».
Si au premier acte Jean-Michel Ribes utilise des propos qui s’éloignent de ceux utilisés dans la réalité : « pédaler plus pour avoir plus de bonus », au second acte il n’en est rien. L'auteur est direct dans ses propos : il parle de Rolex, d’un voyage sur le yacht d’un ami. La rencontre du pape (sans envoi de SMS cependant) est d’une grande originalité scénique : pas de "papamobile" mais le pape est quand même « mobile », grâce à un artifice scénique qu’il fallait trouver !
La scène de la salle Renaud-Barrault du théâtre du Rond Point est ouverte sur toute sa largeur : il y a 21 comédiens sur scène (ainsi qu’un orchestre dans une fosse). La scénographie de Patrick Dutertre utilise des structures métalliques sur roulettes, dans lesquels des rideaux peuvent être baissés, soit pour projeter des vidéos, soit pour faire découvrir un lieu (par exemple « le réveil de l’opposition » : un grand moment comique).
Les éléments de structure du décor, les vidéos et au premier plan l'orchestre
Deux cents costumes signés Juliette Chanaud viennent colorer ce spectacle.
"René l'énervé" a une durée de 2h45 dont 15 minutes d’entracte. Cependant on ne voit pas le temps passer. Il a été écrit en 2 mois… mais avec 15 heures de travail par jour !
Inutile de dire que le spectacle est déjà plébiscité par le public, et c’est mérité.
Alors, me direz-vous, comment se termine cette histoire ? Elle pourrait se répéter en boucle, compte tenu du fait qu’aujourd’hui comme le dit son auteur « les politiques font du spectacle », et on assiste déjà à des scènes qui rappellent ce que nous avons connu…
Aussi pour finir son spectacle, Jean-Michel Ribe a trouvé une fin très originale. On devrait même parler d’une double fin, ou plutôt d’une fin à tiroir, car quand on croit l’action finie, elle reprend… et puis il y a le final ultime, où la troupe viendra conclure sur ce qui n’était qu’un « divertissement ».
Jean-Michel Ribes, a dû se faire plaisir en écrivant le texte de « René l’énervé », en tout cas le public en apprécie le résultat.
En résumé : c’est le grand spectacle musical qu’on n'attendait plus. Avec une véritable histoire, de bons textes, une bonne musique, d’excellents comédiens. Who could ask for anything more?
Un grand merci à Jean-Michel Ribes pour ce spectacle !
J’avais fini par croire qu’en France, les textes des grands spectacles musicaux actuels, n’utilisaient que le verbe « aimer » conjugué à toutes les personnes. Leur titre évoquant généralement l’amour, leur histoire d’une banalité affligeante et leur musique ressemblant plus à une série de pseudo hit musicaux passant en boucle sur les chaines de radio et télévision les transformant ainsi en succès du fait d’une espèce de bourrage de crâne.
Bref, je devrais marquer d’une pierre blanche cette soirée durant laquelle j’ai pu constater qu’il existait en France des grands spectacles musicaux dignes de ce nom.
Mais il ne faut pas oublier pour autant les petits bijoux que l’on peut voir ça et là comme « La Nuit d’Elliot Fall » la saison dernière, « Dorian Gray » actuellement, ou « Andromaque, Fantaisie Barock’ » très bientôt au vingtième théâtre. Ce sont des spectacles dans lesquels des comédiens talentueux interprètent avec conviction, et pour le plus grand bonheur du public, une histoire bien construite avec un texte réellement travaillé… mais ces spectacles se font écraser par la publicité que des « opéras rocks » peuvent s’autoriser, grâce à leurs moyens financiers.
Régis Gayraud
Auteur et metteur en scène : Jean-Michel Ribes
Compositeur : Reinhardt Wagner
Vidéo : Pierrick Sorin
Scénographie : Patrick Dutertre
Costumes : Juliette Chanaud
Lumières : Fabrice Kebour
Chorégraphie : Lionel Hoche
Son : Samuel Gutman, Guillaume Monard
Perruques et maquillages : Cécile Larue
Orchestration : Reinhardt Wagner, Steve Journey
Création des têtes de cerfs : Anna Deschamp, Sean Dunbar
Direction musicale : Delphine Dussaux
Assistante à la mise en scène : Virginie Ferrere
Il est possible de trouver le texte chez Acte Sud Papier, ainsi que le CD (23 titres) disponible en téléchargement à partir du 19 octobre.
Sophie Angebault, Caroline Arrouas, Camille Blouet, Sinan Bertrand, Gilles Bugeaud, Claudine Charreyre, Benjamin Colin, Till Fechner, Emmanuelle Goizé, Sophie Haudebourg, Sébastien Lemoine, Jeanne-Marie Lévy, Thomas Morris, Antoine Philippot, Rachel Pignot, Alejandra Radano, Guillaume Severac-Schmitz, Fabrice Schillaci, Gilles Vajou, Jacques Verzier, Benjamin Wangermée
Musiciens :
Emelyne Chirol / Noémie Poumet : violon (en alternance)
Laurent Desmurs : piano
Jean-Yves Dubanton : guitare et percussions
Ghislain Hervet : clarinette et saxophone baryton
Maëva Le Berre : violoncelle
Dominique Vernhes : flûte, accordéon et saxophone ténor
Informations pratiques sur le spectacle à Paris :
Lieu : Théâtre du Rond Point salle Renaud-Barrault (745 places) 2bis Avenue Franklin Delano Roosevelt, Paris 8ème. 75008 Paris
Du 7 septembre - 29 octobre
Jours et heures : du mardi au samedi à 21h, dimanche à 15h
Prix : 34€ Tarifs réduits : groupe (8 personnes minimum) 20€ / plus de 60 ans 25€ Demandeurs d’emploi 16€ / moins de 30 ans 14€ / carte imagine R 10€
Réservations - par téléphone : 01 44 95 98 21 (du lundi au samedi de 11h à 19h et le dimanche de 12h à 16h) - par internet : théâtre du rond point, FNAC
Le spectacle se jouera à l’Opéra National de Lorraine / Nancy du 14 au 18 mars 2012. |
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© Texte : Régis Gayraud / Musicals in Europe